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Facebook pourrait bientôt être jugé par la justice française

La cour d'appel de Paris doit décider jeudi si les tribunaux français sont compétents pour juger le réseau social, dans le cadre d'une affaire l'opposant à un utilisateur. La décision pourrait ouvrir une brèche dans la défense habituelle de la firme, qui renvoie aux juridictions californiennes.
La justice prend du temps, surtout contre Facebook: depuis quatre ans, un internaute tente de poursuivre le réseau social sur la base de la législation française. Problème: le siège social de la firme est basé aux États-Unis et les conditions d'utilisation renvoient à une juridiction californienne. La justice française n'aurait donc pas son mot à dire dans les litiges impliquant le réseau social. Un argument battu en brèche par l'avocat de l'internaute et sur lequel la cour d'appel de Paris doit se prononcer jeudi, décidant ainsi si Facebook pourra à l'avenir être jugé en droit français.
À l'origine du litige figure un simple partage de lien. Le 27 février 2011, un instituteur parisien passionné d'art recommande sur sa page un reportage sur le tableauL'Origine du Monde, de Gustave Courbet. Le lien est accompagné d'une photo de l'œuvre, représentant un sexe de femme. Nudité inacceptable, pour Facebook, qui suspend le compte de l'utilisateur. Ce dernier voit dans la manœuvre une atteinte à la liberté d'expression. Face à l'absence de réponse aux courriers adressés à Facebook, il se lance dans des poursuites judiciaires.
«Nous avons engagé une action en responsabilité contre Facebook afin de demander deux choses: la réactivation du compte Facebook ainsi que des dommages et intérêts», explique au Figaro son avocat, Me Stéphane Cottineau. Le juriste entendait invoquer la liberté d'expression et s'appuyer sur l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme, qui garantit le droit de «parler, écrire, imprimer librement». Mais alors que chaque partie s'apprêtait à plaider sur le fond, Facebook a chamboulé la procédure en annonçant que le jugement ne pouvait être rendu par une juridiction française.

Facebook prévoit l'application du droit américain

La déclaration des droits et responsabilités du réseau social, qui figure dans les conditions d'utilisation acceptées par tout utilisateur, indique en effet que toute action en justice contre Facebook doit se faire «exclusivement devant un tribunal américain du Northern District de Californie ou devant un tribunal d'État du comté de San Mateo». Le droit applicable dans un litige est celui de l'État de Californie, «sans égard aux dispositions en matière de conflits de lois», précise encore le texte.
«Cela signifie que les 22 millions d'usagers de Facebook ne pourraient jamais saisir les tribunaux français contre Facebook!», dénonce Stéphane Cottineau. Devant le tribunal de grande instance de Paris, l'avocat a remis en cause la légalité de cette clause attributive de compétences. «On ne peut déroger, par des conditions particulières, aux principes généraux du droit», rappelle le juriste, qui a notamment plaidé pour que le droit de la consommation puisse s'appliquer aux litiges.«Facebook gagne un euro par mois et par utilisateur», fait valoir l'avocat, estimant qu'un utilisateur ne peut être considéré comme simple usager puisqu'il existe «une contrepartie financière».
Lors de l'audience du 22 janvier, l'avocate du réseau social, Me Caroline Lyannaz, a réfuté cet argumentaire. «Le service est gratuit», a-t-elle fait valoir, selon l'AFP. Et de préciser que l'ouverture du compte est laissée à l'initiative de l'internaute, qui accepte les conditions générales d'utilisation. Sollicitée par Le Figaro pour des précisions sur le sujet, la juriste a cordialement fait savoir qu'elle est «tenue par la confidentialité» et ne peut s'exprimer.

Des procédures dans plusieurs pays

Une précédente décision rendue par la cour d'appel de Pau avait tranché cette question. Saisie par un internaute banni du réseau social, la cour avait estimé les tribunaux français compétents pour juger ce type d'affaires. La clause attributive de compétences est «noyée dans de très nombreuses dispositions», expliquaient les magistrats. Cette décision «n'a toutefois pas le même aura jurisprudentiel qu'une décision de la cour d'appel de Paris», précise Stéphane Cottineau, qui compte s'appuyer dessus.
La décision de la cour d'appel pourrait permettre à des internautes de mener une action en France contre Facebook, et potentiellement d'autres firmes basées aux États-Unis. L'UFC-Que choisir avait ainsi assigné en justice Facebook, Twitter et Google+ en raison de leurs conditions d'utilisation trop peu claires et contraires à la législation française. Ces réseaux sociaux proposent «un contrat type pour toutes les nations du monde» et ils ne se préoccupent pas de s'adapter au pays, expliquait auFigaro Amal Taleb, juriste de l'association, qui résumait: «Le contrat n'est pas en conformité avec le droit français.»
La problématique touche d'autres pays européens. En août, l'étudiant Max Schreims a invité des internautes de toute l'Europe à se joindre à la procédure autrichienne contre la filiale irlandaise de Facebook, qui gère le réseau social en Europe (les filiales de chaque pays ne sont pas considéréescomme des représentants juridiques). L'action, suivie par plus de 20.000 internautes, donnera lieu à une première audience en avril. En Allemagne, une cour d'appel berlinoise, saisie par une association de protection des consommateurs, a estimé en février 2014 que la loi allemande devait s'appliquer à Facebook et que certaines clauses des conditions d'utilisation de Facebook étaient contraires à la législation allemande. La question reste toutefois difficile à trancher: un an auparavant, la cour d'appel du Schleswig-Holstein était revenue sur l'interdiction faite à Facebook, toujours au nom du droit allemand, d'exiger le nom réel de ses utilisateurs... Reste que ces juridictions allemandes ont été amenées à se prononcer sur des litiges liés à Facebook. Ce que réclament l'avocat Stéphane Cottineau et son client en France.

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