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Au-delà de la crise...

La crise : les économistes, qui ne l’ont pas vue venir, en dissertent dans les médias, et les politiques, qui se sont révélés incapables de la freiner, multiplient les réunions et les annonces de décisions qui restent sans grand effet.
Ni les uns ni les autres ne sont par conséquent crédibles lorsqu’ils tentent de nous rassurer. Et je dirais même que leurs prévisions… discordantes ajoutent à notre trouble.
Que faire ?

Je m’en remets pour ma part à la sagesse des grands « praticiens » du siècle dernier, en particulier ceux d’entre eux qui ont eu à affronter des crises.
Ils en ont tiré des enseignements et laissent, à l’intention des pays comme des entreprises, des recommandations dont je vous livre celles qu’il me paraît utile d’avoir à l’esprit en période de crise.
C’est la gestion et sa qualité qui font la différence.
Les pays et les entreprises qui s’en sortent le mieux sont ceux qui sont les mieux gérés. Cela est encore plus vrai en temps de crise.
Bien entendu, la dotation de départ - les finances, les ressources naturelles et l’environnement - entre en ligne de compte : ils constituent soit un atout, soit un handicap.
Comme une entreprise, un pays ne peut réussir s’il n’a, en plus de la paix et de la cohésion, de très bons gestionnaires et contrôleurs.
Et d’excellents vendeurs-créateurs : la vente et l’exportation sont, en effet, une création.
Survivront à la crise donc, et en sortiront intacts, voire renforcés, nous disent ces hommes d’expérience, les pays et les entreprises qui auront eu la chance d’avoir à leur tête des gestionnaires avisés et prudents.
Ils complètent cette analyse par le rappel de deux lois du capitalisme. Implacables et méconnues, elles ont été à l’origine de la fortune des pays et entreprises qui ont eu le courage de les respecter ; elles ont, à l’inverse, durement sanctionné ceux qui ont cru pouvoir les transgresser. Elles disent ceci :
La richesse ira
a) là où le travail sera créatif quel qu’en soit le coût
b) là où le travail non créatif sera au prix le plus bas.

Barack Obama : il n’a pas encore constitué ses équipes et ne fait pas de confidences, évitant ainsi d’alimenter les spéculations journalistiques.
Mais l’on en sait assez sur ses intentions pour prévoir ce qu’il tentera de réaliser en politique étrangère dans les deux premières années de son premier mandat de quatre ans :
« Je fermerai Guantánamo et l’Amérique ne torturera plus », a-t-il déjà déclaré, confirmant ses promesses électorales.
Au-delà, il voudra, je pense, être l’homme de plusieurs très grands changements. Pour cela, il lui faut :
- effacer les stigmates laissés par les huit années de son prédécesseur
- corriger des erreurs stratégiques commises par son pays au cours du dernier demi-siècle.

C’est donc à une révision déchirante mais salutaire qu’il va procéder.
1) Cuba : l’embargo imposé depuis bientôt un demi-siècle à cette île située au large de la Floride a contribué à la maintenir sous la férule d’un communisme de type soviétique, géré par les frères Castro, et à en faire une sérieuse nuisance pour les États-Unis.
Barack Obama est le premier président américain en mesure de lever cet embargo sans que lui ou son parti aient à payer un prix électoral inacceptable. Il le fera, assez vite à mon avis, et, selon toute probabilité, Cuba deviendra à son tour « un pays socialiste à économie de marché ».
Comme la Chine et le Vietnam, il continuera à être dirigé par le même parti communiste, mais rajeuni, ouvert sur le monde et réconcilié avec les États-Unis. Il pratiquera un capitalisme… pur sucre, sans le reconnaître, et Fidel Castro sera à ce ­nouveau Cuba ce que Mao est à la Chine d’aujourd’hui : une icône dont on dira du bien sans le penser vraiment…

2) L’Irak : pour ne pas présider à l’échec de son équipée irakienne, George W. Bush a envoyé dans ce pays, en 2007, trente mille soldats supplémentaires.
Il reviendra à Barack Obama de retirer, d’ici à la fin de 2010, la totalité ou la quasi-totalité des 170 000 hommes du corps expéditionnaire américain en Irak.
On dressera alors le vrai bilan d’une aventure ­politico-économico-militaire qui aura duré sept longues années. Mais on sait d’ores et déjà qu’elle a déstabilisé l’ensemble du Moyen-Orient au lieu d’y propager la démocratie.

3) L’Iran : à partir de 1953, les États-Unis ont imposé à ce pays le shah et sa dictature, qui resteront en place un quart de siècle ; sous la direction de leur clergé et, singulièrement, de l’imam Khomeiny, les Iraniens ont renversé le shah en 1979 et ont traité les États-Unis (et leur allié israélien) depuis lors en ennemis ; leur République islamique s’est employée à contrecarrer l’influence de ces derniers et à leur disputer le leadership au Moyen-Orient.
S’il sait distinguer les intérêts vitaux des États-Unis de ceux, à court terme, d’Israël, Barack Obama voudra mettre un terme à « la guerre de trente ans » qui oppose son pays à l’Iran. Il donnera à ce dernier la place qu’il demande (et mérite) sur l’échiquier de la région et le réintroduira (prudemment) dans le jeu.

4) L’équilibre du Moyen-Orient : le nouveau président américain et son proche entourage - où des juifs américains de gauche sont nombreux et influents - vont sortir de leurs manches deux jokers.
a) La Turquie : ce grand pays de 75 millions d’habitants réunit des caractéristiques qu’on ne trouve pas ailleurs ; il est musulman et démocratique ; il se trouve au Moyen-Orient (limitrophe de l’Irak et de l’Iran), tout en étant promis à devenir membre de l’Union européenne ; il entretient des relations étroites avec tous les pays et entités de la région, y compris ceux qui ne se parlent pas : Iran et Israël, Israël et Hezbollah, Israël et Syrie.
Malgré cela et très stupidement, le président Bush a ignoré la Turquie et l’a même traitée avec mépris.
Barack Obama a décidé, lui, de faire le contraire : il donnera à ce pays le rôle que l’Égypte, mal (et trop longtemps) dirigée par Hosni Moubarak, a laissé échapper.

b) L’offre de paix arabe à Israël * : le tandem Bush/Sharon avait décidé de l’ignorer, mais elle a fait son chemin en Israël même et auprès des juifs américains les plus éclairés.
Barack Obama a dit aux dirigeants israéliens qu’ils ont eu tort de ne pas saisir la proposition de paix ­globale qui leur avait été faite.
C’est, en tout cas, sur la base de cette offre qu’il cherchera, en 2009 et 2010, à apaiser la région et à en redessiner la carte.

* Élaborée à Amman en 2001, formulée à Beyrouth en 2002, renouvelée, depuis, à plusieurs reprises, elle propose à Israël une paix globale avec les 22 pays de la Ligue arabe et la fin, donc, de la guerre commencée en 1948, contre le retour par Israël à ses frontières du 4 juin 1967.

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